Inspecteur général des monuments historiques,
à Ludovic Vitet,
Président de la commission des monuments historiques. 22 juillet 1846.
Eglise et Recevresse d’Avioth
L’église est bien mieux que je ne l’avais supposé et que Boeswilvald avec sa modestie germanique ne nous l’avait dit. Il y a deux portails couverts de sculptures du XVIe siècle d’un très bel effet et d’une fort bonne exécution. Plusieurs des statuettes dans les voussures sont si bien sculptées qu’on pourrait les prendre pour un ouvrage du XIIIe. En outre il y a dans le chœur un tabernacle, une custode, des sièges pour les officiants, etc., merveilleusement sculptés, en pierre. Vous savez combien ces dispositions-là sont rares maintenant. A Avioth elles sont parfaitement conservées. Je me trompe. On les a indignement badigeonnées ainsi que les apôtres accolés aux colonnes du choeur. C’est le prédécesseur du curé actuel qui en a eu la première idée, et celui-ci vient de faire passer une nouvelle couche à l’huile. Je lui ai fait une scène et en arrivant je suis allé le dénoncer a son évêque qui me promet de lui écrire de la bonne encre.
Les gamins d’Avioth lancent des pierres contre les saints des voussures. Le maire n’ose les poursuivre de peur de se mettre mal avec leurs parents. J’ai promis aux ouvriers de Boeswilvald que le Maire leur donnerait une gratification s’ils parvenaient à saisir un des coupables en flagrant délit. Si l’on peut faire condamner un de ces petits iconoclastes, l’amende et la fessée paternelle qui suivra seront sans doute d’un exemple salutaire pour l’avenir.
Je crois l’église d’Avioth tout à fait digne de secours, mais, pour vous proposer quelque générosité, j’attendrai que nous soyons plus riches.
Adieu, mon cher Président, je vais à Rembercourt et de là à Bermont voir la chapelle de Jeanne d’Arc que je soupçonne fort d’être une mystification.
Pr M.