(30 août 1914- novembre 1918)
enu par l’armée française jusqu’au 25 août 1914, Avioth fut pendant huit jours sur la première ligne qui formait là une pointe avancée dans les lignes allemandes établies derrière la frontière franco-belge. La retraite précipitée de l’armée coloniale le sauva de la destruction et de l’incendie comme ce fut le sort des deux villages ardennais proches, Herbeuval et Margny où furent en outre fusillés quarante-deux civils, le curé en tête. Cette retraite en effet n’eut lieu qu’après que l’on eut découvert sur le corps d’un noble officier allemand, tué par un chasseur français, le plan d’attaque de l’ennemi qui devait s’exécuter le soir même.
Après ce départ des Français que l’on osait croire définitif, ce fut la tranquillité la plus complète que venait rarement troubler le passage d’une patrouille de uhlans , à la poursuite des coloniaux disséminés dans les bois à la suite des engagements malheureux de Bellefontaine et Robelmont (Belgique). Aucune nouvelle, plus de canonnades, c’était l’isolement complet.
Montmédy avait été évacué sans défense le soir du 29 août et l’on sait comment sa garnison forte de cinq mille hommes fut attaquée dans sa retraite sur Verdun et en grande partie faite prisonnière. De nombreux soldats, tous de la région, avaient profité du désarroi pour regagner leurs foyer ; ils vécurent cachés quelques temps dans les caves, puis finalement, le plus souvent à la suite de dénonciation comme ce fut aussi le cas ici, ils furent contraints de se livrer. Il y eut cependant ici une exception ; celui-là put rester en Belgique où il avait de la parenté. D’autres enfin s’étaient fait des abris dans les bois, préférant à la captivité la plus misérable des vies. Au mois de septembre 1915, j’en rencontrerai un de ceux-la qui venait d’être pris.
La bataille de la Marne, en faisant refluer les allemands sur l’Argonne, nous rapprocha du théâtre des opérations et c’est ainsi que le 22 septembre, nous arrivèrent les premières troupes à loger. C’était une colonne de ravitaillement qui revenait à l’arrière mais pas à vide car leurs soixante voitures étaient lourdement chargées de mobilier luxueux provenant au dire des soldats de Dun sur Meuse. Ils avaient enlevé jusqu’aux correspondances qu’ils trouvaient dans les maisons abandonnées. Ces pillards cependant ne furent pas trop à charge de la population, ils n’étaient pas exigeants, payaient honnêtement ce qu’ils demandaient ; les officiers ne s’inquiétaient nullement ou très peu des civils, de sorte que tout avait repris son train de temps de paix. Le ravitaillement en farine seul se faisait difficilement, car il fallait aller à Juvigny à dix-huit kilomètres environ et au travers de mouvements de troupes continuels.
Avec des sauf-conduits, obtenus alors sans difficulté, il était possible de voyager et d’aller même en Belgique, ce qui plus tard fut sévèrement défendu.
Les offices religieux étaient fréquentés par de nombreux soldats d’une autre colonne qui remplaça la première en décembre. Ceux-ci étaient en grande partie catholiques et ils avaient sollicité près de monsieur le curé l’autorisation qu’il leur accorda de chanter en allemand, pendant la seconde partie de la messe, leurs chants habituels.
Auteur inconnu – Archives Abbé Henri CHEVALIER