epuis 1910, le curé d’Avioth était le R. P. Clovis Bernard, religieux oblat de Marie Immaculée, qui s’efforçait de reprendre la féconde tradition des Jacquemain et des Moutaux. Il y réussissait déjà, quand éclata la Grande Guerre.
Hors d’âge pour être mobilisé, M. Bernard demeura à Avioth durant l’invasion. Il préserva, autant qu’il le put, le domaine de Notre-Dame, des déprédations ennemies.
Il ne put malheureusement empêcher en 1917, un double malheur. Emules des Croates de 1656, les Allemands s’emparèrent des tuyaux de l’orgue. M. l’abbé Chevalier, aujourd’hui curé de Lachaussée, et alors séminariste et organiste, usa de toute sa connaissance de la langue allemande, pour persuader l’officier commandant l’expédition, d’épargner cette pièce historique. Celui-ci consentit à en référer par téléphone à la kommandantur de Montmédy. Pendant qu’il parlementait avec ses chefs, ses hommes, impatients, se mettaient à l’oeuvre, et lorsqu’il parut à la porte de l’église, annonçant que l’orgue serait épargné, il était trop tard. Tous les tuyaux gisaient déjà sur le sol, lancés d’en haut par les nouveaux Vandales !
Puis ce fut le tour des cinq cloches, brisées sur place à coups de marteau, et jetées sur la place. Enfin, pour n’être pas en reste avec leurs devanciers, les Allemands installèrent des chevaux dans le temple, scellant aux murs des fers pour y attacher leurs montures. Ces fers y sont demeurés fixés, et témoigneront aux siècles futurs des véritables sentiments de la vertueuse Germania, qui prétendait avoir Dieu avec elle.
Parmi ces profanations, M. Bernard tremblait surtout pour la statue miraculeuse. Lors du recul allemand de novembre 1918, on s’attendait, d’une heure à l’autre, à voir Avioth évacué. Aussi le prêtre prit-il ses dispositions pour emporter la vénérable effigie dans une valise, en cas de départ. Mais l’armistice sonna. Une fois de plus, ‘Notre-Dame s’était sauvée elle-même des mains sacrilèges.
Celui qui rappelle ces souvenirs, a encore présente à la mémoire, la belle journée du 11 septembre 1919, où la France et la Belgique joignirent fraternellement leurs actions de grâces, comme elles avaient uni leurs souffrances. C’était la preuve que, si l’on n’avait pu, durant l’épreuve, venir comme autrefois prier Marie chez Elle, on l’avait néanmoins invoquée de loin, et que la distance ne comptant jamais pour un coeur de Mère, elle avait répondu à chaque appel, et combien tendrement !
« Avioth Histoire de son Pèlerinage, Visite de sa Basilique »
Première édition – 1927